Tenons la barre moussaillon. La mer est houleuse mais nous y ferons face et nous vaincrons.
L’humain tient ferme le gouvernail et de toute sa force affronte les mers d’emmerdes.
A peine une déferlante passée, une autre arrive. On enchaîne tant bien que mal, appels, paperasses , rendez-vous, émotions, retards, annulations, décès, blessures, enfants, animaux, maladies, grèves, découverts. Les pannes portent de multiples noms, prennent de nombreuses formes.
Notre structure subit peu à peu des avaries.
Les boutons sont de plus en plus au rouge.
On aurait bien besoin d’une escale, d’un répit. Et ils n’apparaissent pas dans le décor. Aucune île visible à l’horizon, même plus un seul phare qui guide dans ces brouillards.
Les systèmes s’emballent. On a de moins en moins de recul sur les situations.
Les cumulonimbus de jugements se dévoilent sans pudeur et menacent les matelots de leurs orages de points de vue: tu aurais dû faire comme ça, tu as échoué, tu es le (la) seul(e) à ne pas y arriver, c’est de ta faute, tu es nul(le), tu dois faire plus d’efforts, tu dois trouver des solutions …
Des intempéries dignes de films hollywoodiens. Jugements en soi, jugements en dehors. Ça va, ça vient. Malgré nos cirés jaunes, nous sommes éclaboussés , trempés jusqu’aux os.
Nous nous demandons pourquoi tout cela nous arrive, à nous? Quels dieux a-t’on provoqués pour vivre ces foudres ? Aurait-on confronté Zeus au point de déclencher sa colère?
La faute à nos parents peut-être, la faute au karma alors.
Les compteurs sont en surchauffe, les moteurs fument, les coques craquent et se déchirent.
Les voiles en lambeaux, le gouvernail arraché, nous finissons par poser genoux à terre. Les forces de la Vie ont été plus fortes que nous.
Minuscule face au géant, nous lâchons, nous abandonnons. Nous nous offrons totalement à la bête pour qu’elle en finisse.
Étonnamment , il arrive alors parfois, au moment où nous délaissons la lutte, qu’un frêle rayon de soleil perce au travers des nuages. Un mot que nous arrivons à entendre, une main qui nous offre son soutien, une idée, une solution, une personne que nous percevons différemment, une respiration qui se fait plus ample.
Parfois, pour modifier nos trajectoires et nos sillons, nous traversons des tempêtes force 40000.
Des courses qu’on peut avoir l’impression de vivre en solitaire. Et pourtant, nous étions nombreux sur la ligne de départ. Où sont-ils tous passés?
Les autres aussi vivent des intempéries, affrontent de puissantes vagues et galèrent sur les mêmes mers, c’est juste que parfois ils ne sont plus dans notre ligne de mire ou que l’écho de leurs vies se perd dans les vents de nos peurs, de nos croyances, de nos silences honteux et coupables.
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